Ecole Nationale de Musique et de Danse - Bourges (18) 2007
Le projet de l’école nationale de musique et de danse de Bourges est l’une des illustrations les plus abouties de l’approche contextualiste revendiquée par l’agence. Les volumes créés et leur implantation traduisent la prise en compte de l’environnement ; de ses contraintes, à l’est, la « muraille » des deux immeubles des années 1970 comprime l’espace d’une rue déjà étroite, comme de ses fortes séductions, la rivière d’Auron et au-delà le parc Saint-Paul à l’ouest. Elle établit de nouvelles relations entre deux parties de la ville, le quartier résidentiel et le parc, qui jusque-là s’ignoraient. Le plan de l’école s’inscrit sur ce terrain comme une pièce de tissage qui définit clairement son emprise, y inclut des espaces plantés et affirme sa perméabilité au monde extérieur. Tandis que les deux axes nord/sud d’une circulation en boucle sont les « fils de chaîne », la trame est constituée d’une alternance de vides et de pleins orientés est/ouest. En syntonie avec l’environnement immédiat, l’expression de ces volumes varie d’une façade à l’autre. Sur la rue dont l’étroitesse impose un point de vue plus rapproché, ils sont lisibles en multiples redents, telle une frange. La continuité urbaine y est matérialisée par la galerie couverte qui longe le bâtiment du parking nord jusqu’à l’entrée ponctuée par la sculpture « Pianiste » de Sylvie Paulhiac, puis par un muret qui clôt les patios. À la mesure du paysage qui se développe à l’ouest, une bande de lisière relie les volumes en bout et offre une image unifiée. Le reflet dans le miroir d’eau de la rivière et le recul permettent la lecture d’un traitement d’ensemble spectaculaire. Comme un paquebot à quai face aux frondaisons du parc, l’édifice organise ses superstructures, habillées de cuivre et de filtres en lamelles horizontales, en retrait d’un socle unificateur qui figure une coque. Cette longue et souple lame en bardage de bois rappelle par sa couleur et ses percements rectangulaires aléatoires le carton perforé d’un orgue de Barbarie. La volonté de relier la rue au parc à travers le tissu bâti s’exprime par la forte transparence au niveau du trottoir, qui donne à lire la complexité du bâtiment et son épaisseur sur un fond végétal. Le hall en double hauteur profite du porte-à-faux de l’auditorium et de l’espace du foyer pour offrir depuis la rue une belle perspective sur le parc. Cette liaison se poursuit par des terrasses qui bordent la rivière. La possibilité de passer sous les galeries de liaison des deux bâtiments extrêmes, renforce la porosité de l’équipement. L’organisation rationnelle des locaux et de leur distribution rend cet ensemble, au premier abord complexe, évident à chacun et appropriable par tous. Chaque secteur a sa circulation propre, mais connectée à la circulation générale qui boucle le projet. Ce réseau n’est pas uniquement fonctionnel, il offre l’occasion de parcours ludiques et poétiques. Combinés au béton de la structure et au verre, le cuivre et le bois enrichissent la référence à l’univers musical, en rappel subtil des matières qui donnent leurs noms aux deux grandes familles d’instruments à vent. Le bois est très présent dans tout l’établissement, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur. Sous des formes multiples, bardage, claustra, habillage acoustique, parquet et platelage, il donne une sensation de chaleureuse continuité. Deux mises en œuvre du cuivre se combinent. La pose classique à joint debout a été choisie pour les toitures des locaux d’enseignement. Des joints ondulants comme une houle, signalent la cage de scène de l’auditorium qui figure le « château arrière du paquebot » en adoucissent sa volumétrie. Cette opération a récemment été labellisée "Architecture contemporaine remarquable" à la suite de la commission régionale du patrimoine et de l'architecture (CRPA) en Février 2023.